Je suis, chaque dimanche, impressionné par la
qualité des commentaires de Marie-Noëlle Thabut sur les textes que nous propose la liturgie du jour.
Ces commentaires, trouvés sur le site "Eglise catholique en France", permettent à toute personne de bonne volonté,
chrétienne ou non, de mieux comprendre la Bible, le livre le plus diffusé au monde. Notamment, en
-
donnant le sens passé de certains mots ou expressions dont la
signification a changé depuis ou peut être mal comprise (aujourd'hui, "Germe de justice", "Parole du Seigneur", "Jérusalem",
"Apocalypse", "Rédemption" ; j'envisage de consacrer une page de mon blog à recenser tous ces mots ou
expressions) ;
Je souhaite arriver à mettre ici, chaque dimanche, les commentaires de Marie-Noëlle Thabut. Ma seule contribution consistera à surligner les passages qui me semblent les plus enrichissants et à écrire en rouge ceux qui parlent d'un thème qui
m'est cher : la liberté (trois autres pages de mon blog seront consacrées à ces passages des Evangiles, du reste du Nouveau Testament ou de l'Ancien Testament qui parlent de la
liberté).
PREMIERE LECTURE - Jérémie 33, 14 - 16
14 Parole du Seigneur.
Voici venir des jours
où j'accomplirai la promesse de bonheur
que j'ai adressée à la maison d'Israël
et à la maison de Juda :
15 En ces jours-là, en ce temps-là,
je ferai naître chez David un Germe de justice,
et il exercera dans le pays le droit et la justice.
16 En ces jours-là, Juda sera délivré,
Jérusalem habitera en sécurité,
et voici le nom qu'on lui donnera :
« Le Seigneur est notre Justice. »
« Je ferai naître chez David un Germe de justice » : en langage biblique, cela veut dire que « un
nouveau roi, descendant de David, va naître et régner à Jérusalem ».
Or, quand le prophète Jérémie prononçait ces paroles, le roi David était
mort depuis bien longtemps et sa dynastie (on l'appelait l'arbre de Jessé) semblait définitivement éteinte. Car le roi Nabuchodonosor avait déporté successivement à Babylone les deux derniers
rois de Jérusalem (vers 600 av.J.C). Désormais, la ville était occupée, le Temple détruit, le pays dévasté, la population décimée. La plupart des survivants avaient été faits prisonniers et
emmenés en exil à Babylone : après la longue marche forcée entre Jérusalem et Babylone, la petite colonie juive semblait condamnée à mourir là-bas, loin du pays. Et l'on pouvait se poser bien
des questions : Israël serait-il bientôt rayé de la carte ? Qu'étaient donc devenues les belles promesses des prophètes ? Depuis Natan qui avait annoncé à David et à sa
descendance une royauté éternelle, on rêvait du roi idéal qui instaurerait la sécurité, la paix, la justice pour tous. Devait-on, à tout jamais, s'interdire de rêver ?
C'est alors que l'Esprit-Saint avait soufflé à Jérémie le langage de l'espoir ;
il commençait par cette formule bien connue : « Parole du Seigneur ». Je m'y arrête un instant : lorsque la prédication d'un prophète commence par la formule « Parole du Seigneur », il faut
être particulièrement attentif. Cela veut dire que ce qui suit est difficile à croire ou à comprendre pour les auditeurs. Si un
prophète prend la peine de préciser
qu'il s'agit bien d'une parole du Seigneur, et non pas seulement de lui-même, c'est parce que ses contemporains sont découragés. Et toute parole d'espoir leur paraît un pieux mensonge !
Pourquoi sont-ils découragés ? Parce que la période est rude, parce que le bonheur promis par Dieu à son peuple depuis Abraham semble s'éloigner tous les jours davantage, parce que le trône de
Jérusalem est désespérément vacant...
Jérémie continuait : « Voici venir des jours où je ferai naître chez David un Germe de justice, et il exercera dans le pays le droit et la justice.
En ces
jours-là, Juda (c'est la région autour de Jérusalem) sera délivré, Jérusalem habitera en sécurité, et voici le nom qu'on lui donnera : Le Seigneur est notre Justice. »
C'est donc justement à ce moment précis où le peuple juif était privé de roi, et où la royauté (et la Promesse qui s'y attache depuis David) semblait définitivement éteinte que le
prophète
osait proclamer : contre toute apparence, la promesse faite par Dieu à David se réalisera. Un nouveau roi viendra qui fera régner la justice. Et alors Jérusalem, dont le nom signifie « Ville de
la Paix » remplira sa vocation. Notre
prophète allait même encore plus loin puisqu'il disait « la promesse
de bonheur que j'ai adressée à la maison d'Israël et à la maison de Juda » comme si ces deux royaumes ne faisaient qu'un ; or, à l'époque de Jérémie, il y avait bien longtemps que le royaume de
Salomon avait été divisé en deux royaumes distincts, plus souvent ennemis que frères, Israël et Juda ; et depuis les conquêtes assyriennes le royaume d'Israël dont la capitale était Samarie a
été rayé de la carte. Et notre
prophète osait parler de réunification ! C'est un pur défi au bon
sens, mais c'est cela la foi ! Belle leçon d'
espérance et bel exemple de ce qu'est une parole prophétique :
celle qui, dans les jours sombres, annonce la lumière.
Mais voici une autre leçon d'
espérance ! Je viens de commenter une prédication que Jérémie a
prononcée au sixième siècle, très probablement à Jérusalem. Le texte que nous lisons ce dimanche, lui, n'est pas de Jérémie lui-même. Il en est la répétition. A vrai dire, on ne sait pas très
bien quand ces lignes ont été écrites, mais on pense qu'il s'agit de la prédication d'un auteur très tardif de l'Ancien Testament, probablement au deuxième siècle av.J.C. (Plus tard, son
discours a été inséré dans le livre du
prophète Jérémie, au chapitre 33, parce que ce prédicateur anonyme
est de toute évidence un fils spirituel de Jérémie).
Il commence par la formule dont je parlais en commençant : « Parole du Seigneur » et on comprend maintenant mieux la suite ; il dit : « Voici venir des jours où j'accomplirai la promesse de
bonheur que j'ai adressée à la maison d'Israël et à la maison de Juda. » Cette promesse de bonheur, c'est celle que son illustre prédécesseur, le
prophète Jérémie a prononcée à
Jérusalem quelques siècles auparavant, dans un autre moment de découragement. Cette promesse de Jérémie figure au chapitre 23 de son livre (nous l'avons lu pour le 16ème dimanche - année
B).
Nous ne connaissons donc pas le nom de ce prédicateur qui reprend les propos de Jérémie plusieurs siècles après lui. Ce qui est admirable, c'est que dans une nouvelle période morose, ce
prophète anonyme rappelle à ses contemporains les promesses de Dieu
annoncées quelques siècles auparavant par Jérémie. « Voici venir des jours où j'accomplirai la promesse de bonheur que j'ai adressée à la maison d'Israël... » Le secret de l'
espérance
invincible des croyants tient en ces quelques mots : notre attente n'est pas du domaine du rêve, mais de la promesse de Dieu. Lui, le fidèle, saura faire naître un nouveau germe sur l'arbre de
Jessé.
A vrai dire, il nous arrive à nous aussi, de connaître le découragement. Depuis des siècles et des siècles, c'est toujours la même question : pourquoi la paix, l'harmonie, la fraternité dont
nous rêvons, semblent-elles inaccessibles, en un mot pourquoi le Royaume de Dieu tarde-t-il tant à s'installer ? Il est bien vrai que le retard dans la venue du royaume de Dieu est un défi pour
notre foi et pour la foi de tous les croyants de tous les temps.
Rassurons-nous : notre foi s'appuie sur deux raisons absolument invincibles : la première c'est que Dieu ne peut pas manquer à une promesse... Mais surtout : et c'est le dernier mot de ce texte
: « Le Seigneur est notre justice. » Cela, c'est la meilleure raison de ne jamais perdre l'espoir. Si nous comptions sur nos propres forces pour transformer le monde, l'entreprise semble bien
perdue d'avance... Mais justement, la merveilleuse nouvelle de ce texte, c'est que la justice qui règnera à Jérusalem et sur toute la terre ne sera pas au bout de nos efforts : elle viendra de
Dieu lui-même !
Confiance dans les promesses du Christ.
Personne inspirée par Dieu pour être son porte parole.
Psaume 24 (25), 4-5, 8-9, 10-14
4 Seigneur, enseigne-moi tes voies,
fais-moi connaître ta route.
5 Dirige-moi par ta vérité, enseigne-moi
car tu es le Dieu qui me sauve.
8 Il est droit, il est bon, le Seigneur,
Lui qui montre aux pécheurs le chemin.
9 Sa justice dirige les humbles,
Il enseigne aux humbles son chemin.
10 Les voies du Seigneur sont amour et vérité
pour qui veille à son Alliance et à ses lois.
14 Le secret du Seigneur est pour ceux qui le craignent ;
à ceux-là Il fait connaître son Alliance.
Du magnifique psaume 24 qui comporte 22 versets (chiffre hautement symbolique dont nous avons souvent parlé), nous n'avons entendu que quelques pauvres lignes tronquées ; cela ne nous facilite
pas la compréhension. En particulier, nous n'avons pas entendu la dernière phrase de ce psaume, et pourtant elle nous aurait expliqué tout le reste. La voici : «
Libère Israël, ô mon Dieu, de toutes ses angoisses ! » L'environnement de cette prière, le terreau dans lequel elle est née, c'est donc une situation
d'angoisse, peut-être l'Exil à Babylone. Ce qui nous met du coup dans une véritable ambiance de prière ! Parce qu'alors c'est vraiment le cri du coeur ! N'oublions pas que « prier » (en latin «
precari ») est de la même racine que précarité. D'autres versets de ce psaume, d'ailleurs, traduisent bien cette détresse, par exemple : « Epargne-moi la honte ; ne laisse pas triompher mon
ennemi... Prends pitié de moi qui suis seul et misérable. L'angoisse grandit dans mon coeur : tire-moi de ma détresse... Vois mes ennemis si nombreux, la haine violente qu'ils me portent. »
Tout cela peut très bien qualifier les douleurs de l'Exil à Babylone ; mais si vous consultez votre Bible, vous verrez qu'au début de ce psaume,
il est écrit « de David », traduction tout-à-fait discutable de la formule en hébreu « LeDavid » ; on risque de supposer que ce psaume est en relation avec l'histoire de David, ce qui le
situerait plus de quatre cents ans avant l'Exil ; mais, à vrai dire, personne ne sait exactement ce que veut dire l'expression hébraïque « LeDavid » : « Le » est une préposition qui signifie «
à », mais aussi « pour » ou « par rapport à »... Ce qui est sûr, c'est que David n'est pas l'auteur de quantité de psaumes (précédés de cette formule) qui sont remplis d'allusions bien trop
claires à la période de l'Exil. Du coup, la formule « de David » ne doit pas être considérée comme une attribution ou une signature, mais elle nous indique un état d'esprit : le peuple
d'Israël, puisque c'est toujours du peuple entier qu'il s'agit dans les psaumes, se coule dans la prière et dans la foi du grand
ancêtre.
Or quel souvenir David a-t-il laissé ? Celui, non pas d'un homme sans faute (tout le monde connaît l'histoire de Bethsabée), mais celui d'un croyant et d'un humble devant Dieu. Un homme qui
savait reconnaître ses fautes et demander le pardon de Dieu. C'est probablement la clé de ce psaume : il suffit d'entendre le vocabulaire employé pour deviner qu'il s'agit d'un psaume composé
pour une célébration de
pénitence ! Aujourd'hui, quand nous préparons une célébration de
Baptême, de
Mariage, de Funérailles, ou encore une
célébration Pénitentielle, ou simplement la
Messe du dimanche, nous cherchons dans les livres de chants ceux qui seront
le mieux adaptés à la circonstance ; et le choix ne manque pas ! Les chants ont même des cotes qui indiquent l'utilisation prévue par les compositeurs. Pour les
psaumes, c'est la même chose, et
ce psaume 24 est visiblement prévu pour accompagner une démarche de
pénitence ; il emploie le vocabulaire du chemin, typique des
psaumes
pénitentiels : parce que le
péché, au fond, c'est une fausse route. Et on sait que le mot «
conversion » signifie « demi-tour ». Dans la
Bible, le pécheur qui se convertit, fait un véritable demi-tour ; on dit
qu'il « revient de son mauvais chemin ». Moïse déjà utilisait la même image, il disait au peuple : « Vous veillerez à agir comme vous l'a ordonné le Seigneur notre Dieu sans vous écarter ni à
droite ni à gauche. Vous marcherez toujours sur le chemin que le Seigneur votre Dieu vous a prescrit... » (Dt 5, 32 - 33).
Ce chemin, c'est la Loi : n'oublions pas que, pour un Juif croyant, la Loi est un cadeau de Dieu, une
très grande preuve de sa tendresse pour l'homme. Le mot même « Loi » (Torah) ne vient pas d'une racine qui signifierait « prescrire », mais du verbe «
enseigner ». Elle enseigne la voie par laquelle aller à Dieu. Le thème « enseigne-moi tes voies » est d'ailleurs très présent dans ce psaume. Car on sait bien que si Dieu a donné la loi à
l'homme, c'est pour son bonheur : la Loi est le mode d'emploi de notre liberté pour que nous soyons heureux puisque Dieu n'a pas d'autre but. A l'inverse, le peuple d'Israël reconnaît qu'il a
été infidèle à l'Alliance et que beaucoup de ses malheurs viennent de là ; l'Exil à Babylone a bien souvent été considéré comme une conséquence de ses infidélités. Et ce psaume est
justement une demande de pardon pour cette infidélité perpétuelle, originelle pourrait-on dire... Au milieu du psaume, le verset 11 dit clairement « pardonne ma faute, elle est grande ».
Or, le premier commandement de la Loi était l'interdiction des idoles ; c'est donc le premier objet de la « conversion » dans la Bible : l'objectif de tous les prophètes est d'abord d'écarter le
peuple des idoles. La première conversion demandée à Israël, c'est de se détourner des idoles pour se tourner vers le seul Dieu vivant, le seul Dieu qui sauve. Dans ce psaume, la phrase «
car tu es le Dieu qui me sauve » est bien l'expression de la résolution de ne se tourner désormais que vers le Dieu d'Israël. D'autres
versets redisent cette ferme décision : « Vers toi, Seigneur, j'élève mon âme... C'est toi que j'espère tout le jour... J'ai les yeux tournés vers le Seigneur. »
La recherche de la perfection morale vient en second lieu ; en second lieu seulement, car si on met la recherche de la perfection morale en premier, cela peut bien être un piège, une façon de
nous occuper de nous-mêmes, de nous préoccuper de notre
sainteté personnelle avant tout et, finalement, de nous prendre
pour le centre du monde. C'est le piège que Jésus dénonce dans la
parabole du pharisien et du publicain : « Le pharisien, debout, priait
ainsi en lui-même : ô Dieu, je te rends
grâce de ce que je ne suis pas comme les autres hommes, voleurs,
malfaisants, adultères. Je
jeûne deux fois par semaine, je paie la dîme de tout ce que je me
procure. » Le publicain, lui, se tourne simplement vers Dieu avec des accents semblables à ceux de notre psaume : « O Dieu, prends pitié du pécheur que je suis. »
Le véritable chemin de conversion, c'est d'abord de se tourner vers Dieu et lui nous tournera vers nos frères.
Fait entrer le nouveau baptisé dans la communauté de l'Église.
L'Ancien et le Nouveau Testament, avant et depuis Jésus-Christ.
Bienveillance de Dieu pour les hommes.
Privation volontaire de nourriture en esprit de pénitence.
Alliance d'un homme et d'une femme dans les conditions prévues par la loi.
Célébration qui commémore le sacrifice du Christ.
Récit allégorique servant à présenter un enseignement et à en faciliter la compréhension.
Transgression volontaire d'une règle ou d'un commandement divin - point de rupture entre Dieu et l'homme.
Conversion de l'esprit et du coeur. Sacrement qui permet de recevoir le pardon des péchés.
Personne inspirée par Dieu pour être son porte parole.
Cantiques ou chants sacrés contenus dans l'Ancien Testament.
Etat de ceux qui vivent dans l'amitié de Dieu.
DEUXIEME LECTURE - 1 Thessaloniciens 3, 12 - 4, 2
Frères,
3, 12 que le Seigneur vous donne,
entre vous et à l'égard de tous les hommes,
un amour de plus en plus intense et débordant,
comme celui que nous avons pour vous.
13 Et qu'ainsi il vous établisse fermement
dans une
sainteté sans reproche
devant Dieu notre Père,
pour le jour où notre Seigneur Jésus
viendra avec tous les Saints.
4, 1 Pour le reste, vous avez appris de nous
comment il faut vous conduire pour plaire à Dieu ;
et c'est ainsi que vous vous conduisez déjà.
Faites donc de nouveaux progrès,
nous vous en prions, frères,
nous vous le demandons dans le Seigneur Jésus.
2 D'ailleurs, vous savez bien quelles instructions
nous vous avons données de la part du Seigneur Jésus.
Etat de ceux qui vivent dans l'amitié de Dieu.
Paul est arrivé à Thessalonique probablement en l'an 50, c'est-à-dire environ vingt ans après la mort et la résurrection du Christ ; c'était un port de commerce très important, et la
capitale de la province de Macédoine, occupée par les Romains. Beaucoup d'étrangers y vivaient, dont une importante colonie juive. Par les Actes des Apôtres, on sait que Paul a fait là ce qu'il faisait chaque fois qu'il
arrivait dans une nouvelle ville : il commençait par se rendre à la synagogue le samedi matin, pour l'office du sabbat ; cette fois il était accompagné de Silas et de Timothée et les Actes nous
disent qu'ils se sont rendus à la synagogue trois samedis de suite. Sa prédication a eu un certain succès, puisque le livre des Actes nous dit encore : « A partir des Ecritures, il expliquait
et établissait que le Messie devait souffrir, ressusciter des morts, et le Messie disait-il, c'est ce Jésus
que je vous annonce. Certains des Juifs se laissèrent convaincre et furent gagnés par Paul et Silas, ainsi qu'une multitude de grecs adorateurs de Dieu et bon nombre de femmes de la haute
société. » (Ac 17, 3 - 4).
Il a converti aussi des païens qui, jusque-là, étaient adorateurs des idoles, puisque dans cette lettre Paul leur dit : « Vous vous êtes tournés vers
Dieu en vous détournant des idoles pour servir le Dieu vivant et véritable » (1 Th 1, 9). Mais ce beau succès soulevait la colère des Juifs hostiles à Jésus. Ils dénoncèrent Paul et ses amis
aux autorités comme ennemis de l'empereur. Et il parut plus prudent de s'enfuir. Paul est donc parti pour Bérée, non loin de Thessalonique, puis à Athènes et enfin à Corinthe. On ne sait pas
exactement combien de temps il a passé à Thessalonique, mais il est clair qu'il y a laissé une communauté chrétienne toute neuve pour laquelle il se faisait du souci. Si bien que, quelques mois
plus tard, « n'y tenant plus » (ce sont ses propres termes), il envoya Timothée à Thessalonique pour voir cette communauté et la soutenir dans la foi.
Le chapitre 3 de cette lettre que nous lisons ici commence par ces mots : « Aussi, n'y tenant plus, nous avons pensé que le mieux était de rester à Athènes, et nous vous avons envoyé Timothée,
notre frère, le collaborateur de Dieu dans la prédication de l'évangile du Christ pour vous affermir et vous encourager dans votre foi, afin que personne ne soit ébranlé au milieu des épreuves
présentes, car vous savez bien que nous y sommes destinés. Quand nous étions chez vous, nous vous prévenions qu'il faudrait subir des épreuves, et c'est ce qui est arrivé, vous le savez. C'est
pour cela que, n'y tenant plus, j'ai envoyé prendre des nouvelles de votre foi, dans la crainte que le Tentateur ne vous ait tentés et que notre peine ne soit perdue. » Les épreuves dont il
parle, c'est la persécution qui continue de la part des Juifs. Or Timothée est revenu avec d'excellentes nouvelles : « Maintenant Timothée vient de nous arriver de chez vous et de nous apporter
la bonne nouvelle de votre foi et de votre amour ; il dit que vous gardez un bon souvenir de nous, et que vous désirez nous revoir, autant que nous désirons vous revoir. Ainsi frères, nous
avons trouvé en vous un réconfort,
grâce à votre foi, au milieu de toutes nos angoisses et de toutes nos
épreuves, et maintenant nous revivons puisque vous tenez bon dans le Seigneur. »
Les versets que nous lisons ce dimanche sont donc en quelque sorte la réaction à chaud de Paul tout ému par ces excellentes nouvelles. Que peut-il souhaiter de mieux ? Les Thessaloniciens sont
sur la bonne voie, il s'en réjouit et il leur dit quelque chose comme : il ne vous reste qu'à persévérer. Persévérer jusqu'à quand ? Jusqu'au jour du retour du Christ : c'est le projet de Dieu
qui donne sens à toute notre vie ; voilà encore un défi au bon sens, comme celui de Jérémie dans la première lecture ; dans un monde qui ne sait plus où il va, le « défi » chrétien, c'est de
vivre toute sa vie « en perspective ». Toute la pensée de Paul est dominée par cette attente de la venue du Christ en gloire au dernier Jour. Et c'est bien la clé du texte qui nous est proposé
ici : il invite les chrétiens à mettre toute leur existence en perspective de ce « jour où notre Seigneur Jésus viendra avec tous les Saints ». La prière que nous disons dans toutes nos
célébrations liturgiques, le Notre Père, nous oriente bien vers ce but : « Que ton Règne vienne, ta Volonté soit faite, ton Nom soit sanctifié... « Les Chrétiens ne sont pas tournés vers le
passé mais vers l'avenir ; et l'on sait bien qu'il faut écrire « A-VENIR » en deux mots : c'est cet « A-VENIR » qui donne sens à notre vie d'aujourd'hui ; c'est très exactement ce que dit Paul
ici : « Que le Seigneur vous établisse dans une
sainteté sans reproche devant Dieu notre Père, pour le jour où
notre Seigneur Jésus viendra avec tous les Saints ». C'est également le sens de la prière qui suit le Notre Père dans la
liturgie eucharistique : « Rassure-nous devant les épreuves en cette vie
où nous espérons le bonheur que tu promets et (c'est-à-dire) l'avènement de Jésus-Christ notre Sauveur. »
Concrètement, mettre toute notre vie « en perspective », c'est la vivre déjà en misant uniquement sur les valeurs du royaume ; et voilà le deuxième aspect du « défi chrétien » : toujours et
uniquement miser sur l'amour. Quand Paul écrit, nous l'avons vu, la vie n'est pas plus rose qu'aujourd'hui. C'est pour cela que c'est vraiment un défi... C'est d'ailleurs tellement un défi que
nous ne pouvons pas y arriver tout seuls ! C'est un don de Dieu ;
Paul dit : « Que Dieu vous donne, entre vous et à l'égard de tous les hommes, un amour
de plus en plus intense et débordant... »
C'est cela être saint : il n'y a pas d'autre sainteté, on le sait bien, que celle de l'amour... puisque « Dieu
est amour », comme dit Saint Jean... » quiconque aime est né de Dieu et connaît Dieu » (1 Jn 1). C'est ce qui explique le lien entre les deux phrases de Paul : « Que Dieu vous donne, entre vous
et à l'égard de tous les hommes, un amour de plus en plus intense et débordant »... « et qu'ainsi il vous établisse fermement dans une sainteté sans reproche... »
Alors nous pourrons « plaire à Dieu », comme dit encore Paul : « Vous avez appris de nous comment il faut vous conduire pour plaire à Dieu » ; ce qui revient tout simplement à accomplir notre
vocation de fils, à l'image du Fils bien-aimé en qui Il se « complaît ».
Dans la primitive Eglise, membre de la communauté chargé de l'annonce de l'Evangile.
Bienveillance de Dieu pour les hommes.
Culte public qui englobe l'ensemble de la prière de l'Eglise et les célébrations sacramentelles.
Rédempteur, Sauveur annoncé dans l'Ancien Testament.
Centre de la foi et de l'espérance chrétienne.
Etat de ceux qui vivent dans l'amitié de Dieu.
EVANGILE : Luc 21, 25-28, 34-36
Jésus parlait à ses
disciples de sa venue :
25 « Il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles.
Sur terre, les nations seront affolées
par le fracas de la mer et de la tempête.
26 Les hommes mourront de peur
dans la crainte des malheurs arrivant sur le monde,
car les puissances des cieux seront ébranlées.
27 Alors on verra le Fils de l'homme venir dans la nuée,
avec grande puissance et grande gloire.
28 Quand ces événements commenceront,
redressez-vous et relevez la tête,
car votre
rédemption approche.
34 Tenez-vous sur vos gardes,
de crainte que votre coeur ne s'alourdisse
dans la débauche, l'ivrognerie et les soucis de la vie,
et que ce jour-là ne tombe sur vous à l'improviste.
35 Comme un filet, il s'abattra sur tous les hommes de la terre.
36 Restez éveillés et priez en tout temps :
ainsi vous serez jugés dignes
d'échapper à tout ce qui doit arriver,
et de paraître debout devant le Fils de l'homme. »
Celles et ceux qui ont suivi et qui suivent Jésus Christ.
Salut apporté à l'humanité par Jésus-Christ.
Si on prend ces lignes au pied de la lettre, il y a de quoi frémir ! Mais nous avons déjà rencontré des textes de ce genre : on dit qu'ils sont de style «
apocalyptique » et nous savons bien qu'il ne faut pas les prendre au premier degré ! Le malheur, c'est que, aujourd'hui, le mot « apocalypse » a
très mauvaise presse ! Pour nous, il est synonyme d'horreur... alors que c'est tout le contraire ! Commençons donc par redonner au mot « apocalyptique » son vrai sens : on se rappelle que «
apocaluptô », en grec, signifie « lever le voile », c'est le même mot que « re-velare » (en latin) - révéler en français ! Il faut traduire « texte apocalyptique » par « texte de révélation
».
Le genre apocalyptique a au moins quatre caractéristiques tout-à-fait particulières :
Premièrement, ce sont des livres pour temps de détresse, généralement de guerre et d'occupation étrangère doublée de persécution ; c'est particulièrement vrai pour le livre de Daniel et pour
l'Apocalypse de Jean : dans ce cas, ils évoquent les persécuteurs sous les traits de monstres affreux ; et c'est pour cela que le mot « apocalypse » a pu devenir synonyme de personnages et
d'événements terrifiants.
Deuxièmement, parce qu'ils sont écrits en temps de détresse, ce sont des livres de consolation : pour conforter les croyants dans leur fidélité et leur donner, face au martyre, des motifs de
courage et d'espérance. Et ils invitent les croyants justement à tenir
bon.
Troisièmement, ils « dévoilent », c'est-à-dire « lèvent le voile », « révèlent », la face cachée de l'histoire. Ils annoncent la victoire finale de Dieu :
de ce fait, ils sont toujours tournés vers l'avenir ; malgré les apparences, ils ne parlent pas d'une « fin du monde », mais de la transformation du monde, de l'installation d'un monde nouveau,
du « renouvellement » du monde. Quand ils décrivent un chamboulement cosmique, ce n'est qu'une image symbolique du renversement complet de la situation. En un mot, leur message c'est « Dieu aura
le dernier mot ». Ce message de victoire, nous l'avions entendu dimanche dernier dans le livre de Daniel. Il annonçait que le Fils de l'homme qui n'est autre que le peuple des Saints du Très-Haut
verrait un jour ses ennemis vaincus et recevrait la royauté universelle.
Quatrièmement, dans l'attente de ce renouvellement promis par Dieu, ils invitent les croyants à adopter une attitude non pas d'attente passive, mais de vigilance active : le quotidien doit être
vécu à la lumière de cette espérance.
Ces quatre caractéristiques des livres apocalyptiques se retrouvent dans notre évangile d'aujourd'hui. Parole pour temps de détresse, elle décrit des signes effrayants, langage codé pour annoncer
que le monde présent passe : « il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles... le fracas de la mer et de la tempête... les puissances des cieux seront ébranlées ». Parole de
consolation, elle invite les croyants à tenir bon : « Votre rédemption (traduisez
votre libération) approche ». Parole qui « lève le voile », « révèle », la
face cachée de l'histoire, elle annonce la venue du Fils de l'homme. Jésus reprend ici cette promesse par deux fois, et visiblement il s'attribue à lui-même ce titre de « Fils de l'homme »,
manière de dire qu'il prend la tête du peuple des Saints du Très-Haut*, c'est-à-dire des croyants : « Alors on verra le Fils de l'homme venir dans la nuée avec une grande puissance et une grande
gloire. » ... « vous serez jugés dignes d'échapper à tout ce qui doit arriver et de paraître debout devant le Fils de l'homme. » Enfin, dans l'attente de ce renouvellement promis par Dieu, notre
texte invite les croyants à adopter une attitude non pas d'attente passive, mais de vigilance active : « Quand ces événements commenceront, redressez-vous et relevez la tête. »... « Tenez-vous
sur vos gardes, de crainte que votre coeur ne s'alourdisse... restez éveillés et priez en tout temps... » « Relever la tête », c'est bien un geste de défi, comme Jérémie nous y invitait dans la
première lecture, le défi des croyants.
Le mot « croyants » n'est pas employé une seule fois ici, mais pourtant il est clair que Luc oppose d'un bout à l'autre deux attitudes : celle des croyants et celle des non-croyants qu'il appelle
les nations ou les autres hommes ; « sur terre, les nations seront affolées... les hommes mourront de peur... mais vous, redressez-vous et relevez la tête » sous-entendu car vous, vous êtes
prévenus et vous savez le sens dernier de l'histoire humaine : l'heure de votre libération a sonné, le mal va être
définitivement vaincu.
Il reste une chose paradoxale dans ces lignes : le Jour de Dieu semble tomber à l'improviste sur le monde et pourtant les croyants sont invités à reconnaître le commencement des événements ; en
fait, et cela aussi fait partie du langage codé des Apocalypses, ce jour ne semble venir soudainement que pour ceux qui ne se tiennent pas prêts :
rappelons-nous les paroles de Paul aux Thessaloniciens : « le Jour du Seigneur vient comme un voleur dans la nuit. Quand les gens diront : quelle paix, quelle sécurité !, c'est alors que la ruine
fondra sur eux comme les douleurs sur la femme enceinte, et ils ne pourront y échapper. Mais vous, frères, vous n'êtes pas dans les ténèbres, pour que (de sorte que) ce jour vous surprenne comme
un voleur. Tous, en effet, vous êtes fils de la lumière, fils du jour... » (1 Th 5, 2 - 5). Paul, comme Luc, type bien deux attitudes différentes.
Comme dans toutes les autres lectures de ce dimanche, les Chrétiens sont donc invités ici à une attitude de témoignage : le témoignage de la foi auquel nous invitait Jérémie dans une situation
apparemment sans issue, à vues humaines ; le témoignage de l'amour dans la lettre aux Thessaloniciens : « Que le Seigneur vous donne à l'égard de tous les hommes un amour de plus en plus intense
et débordant » ; le témoignage de l'espérance alors que tout semble s'écrouler dans cet évangile : «
Redressez-vous et relevez la tête... Vous serez dignes... de paraître debout devant le Fils de l'homme ». « Les hommes mourront de peur », mais vous, vous serez debout parce que vous savez que «
rien, ni la vie, ni la mort... ne peut nous séparer de l'amour de Dieu révélé dans le Christ » (Rm 8, 39). Ce triple témoignage, voilà bien le défi chrétien. Beau programme pour cet Avent qui
commence !
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* On sait que dans le livre de Daniel, le Fils d'homme est en réalité un personnage collectif, le « peuple des saints du Très-Haut ».